Les Colombiens pour l’Ukraine

Sur certaines zones du front en Ukraine, on n’entend plus l’ukrainien ou le russe mais l’espagnol, et notamment un espagnol de Colombie.

Les Colombiens sont devenus ces deux dernières années le premier contingent de combattants étrnagers en Ukraine

et pour des raisons politiques et pratiques, ils soutiennent les forces armées ukrainiennes qui, on le sait, souffrent d’un cruel manque d’hommes.

Et tout ça avec des résultats assez tangibles.

Bonjour à tous c’est Sébastien, bienvenue dans cette nouvelle vidéo où l’on parle d’un phénomène de recrutement à l’international qui prend de l’ampleur,

à un moment où les Européens hésitent encore et toujours sur le déploiement de leurs troupes et leurs garanties de sécurité.

Je ne veux pas trop m’étendre sur le sommet de la coalition des volontaires qui s’est tenu à Paris hier

les Européens ont montré leurs muscles et c’est très bien, mais leur initiative ne va probablement déboucher sur rien

d’une part parce qu’ils répètent à tout bout de champ que leurs garanties de sécurité, notamment le déploiement de troupes européennes en Ukraine, ne peut se faire qu’après un cessez-le-feu

qui n’arrivera pas, les Russes n’y ont aucun intérêt et ça ne rentre pas dans leur tradition de négociation avec une méthode d’ultimatum, la fameuse méthode Gromiko.

d’autre part parce qu’ils sont dépendants, ou en tout cas ils se percoivent comme dépendants des Etats-Unis et du bon vouloir de Donald Trump

et Donald Trump, il n’est pas dans une bonne humeur en ce moment, on le voit avec ces messages d’adolescent frustré sur les réseaux sociaux, comme celui-ci sur ses ex Poutine et Kim qui se sont choisis un nouveau copain, Xi

c’est assez pathétique. Et selon le tabloid allemand Bild, une conversation téléphonique hier entre les Européens, Volodymyr Zelensky et Donald Trump s’est très mal passée,

les Européens souhaitaient une assurance ferme que la Maison blanche allait soutenir leurs garanties de sécurité et assurer au moins un rôle dans la défense aérienne ou la surveillance d’une partie du front

mais Donald Trump se serait énervé contre eux, en répétant que les Européens doivent faire plus, encore plus,

que c’est leur guerre, qu’il n’a pas envie de rajouter des sanctions

autant dire que le projet paraît très bancal

tout simplement parce qu’il repose sur la bonne volonté de Donald Trump et de Vladimir Poutine, deux acteurs qui ont démontré qu’ils n’étaient pas là pour faciliter la vie aux Ukrainiens ou aux Européens, c’est un euphémisme.

Et je ne parle même pas de la déclaration de Vladimir Poutine comme quoi les troupes européennes en Ukraine seraient des cibles légitimes

ça j’ai envie de dire c’est classique, et c’est normal que le Kremlin n’aime pas l’idée et qu’il la considère comme une ligne rouge

mais les lignes rouges comme on a vu ces dernières années, ça devient rose pâle et ça se franchit sans conséquence apocalyptique donc on s’en fiche un peu de cette déclaration.

par contre l’impuissance des Européens qui n’arrivent pas, pour des bonnes ou des mauvaises raisons, à imposer leurs initiatives de sécurité sur leur propre continent, ça c’est bien plus perturbant.

Je vous renvoie à la déclaration toute fraîche de Ffriedrich Merz qui est un constat d’impuissance criant, du chancelier de la troisième économie du monde…

Bon, après cette longue introduction sur les Européens qui parlottent pendant des mois, depuis février quand même, pour à la fin décider de ne rien faire,

on ne peut que rappeler que la Corée du nord de son côté a beaucoup moins hésité et que son intervention a été beaucoup résolue, et que ce n’est potentiellement qu’un début.

et ça nous ramène au sujet des combattants étrangers en Ukraine, et spécifiquement des Colombiens.

le sujet des combattants étrangers, il date du premier jour de la guerre, même avant puisqu’on avait des étrangers des deux côtés de la ligne de front entre 2014 et 2022

On avait beaucoup de post-soviétiques, notamment des Géorgiens,

mais aussi des Européens, des Français, des Allemands, des Polonais, des Finlandais

leur nombre se comptait en quelques dizaines, voire centaines

et là évidemment on parle de groupes de certaines nationalités mais pas de contingent officiellement dépêchés par un pays pour se battre contre les Ukrainiens

ça, seule la Corée du nord l’a fait. en dehors de ce cas là, il n’y a rien d’officiel.

le 24 février 2022, c’est passé directement à plusieurs milliers, qui ont été intégrés avec plus ou moins de succès côté ukrainien, au sein d’une légion internationale ou d’unités spéciales,

mais après un an, deux ans, trois ans, l’afflux d’Européens, d’Américains, d’Australiens et autres occidentaux s’est tari.

Ceux qui sont venus pour défendre la liberté de l'Ukraine ont vite déchanté face à une guerre de haute intensité, l'arrivée des drones et les difficultés à la fois financières et technique avec le commandement ukrainien.

Et l’Ukraine, pour faire face à ses problèmes de recrutement, est allée chercher ailleurs

D’autant que la Russie a fait de même, en recrutant en Syrie, au Sri Lanka, en Asie centrale, en Afrique,

et là on parle de campagnes de recrutement qui ne sont pas forcément explicites, et pas forcément désirées,

puisqu’on a de nombreux témoignages de ressortissants étrangers qui ont été attirés en Russie pour y travailler, mais qui se sont retrouvés recrutés et dépêchés vers le front.

L’Ukraine connaît beaucoup de problèmes de recrutement et on connaît bien les méthodes brutales de recrutement de sa population qui créent beaucoup de tensions, j’en avais parlé dans une précédente vidéo.

En ce qui concerne le recrutement des combattants étrangers, ça se fait avec beaucoup plus de souplesse et de respect des règles

il y a des cas d’incompréhension, de barrière culturelle, d’arnaques en ligne, mais globalement les combattants étrangers en Ukriane sont enregistrés officiellement, avec un bulletin de salaire, et des prises en charge en cas de blessure.

Peut-on parler de mercenaires ? La frontière entre volontaires et mercenaires est assez floue, ces soldats sont intégrés dans l'armée ukrainienne et disposent d'un contrat officiel, ce qui fait donc d'eux des volontaires. Mais vu qu'ils viennent pour l'argent, on peut aussi dire mercenaires.

Parmi eux, beaucoup de sud-Américains de tous les pays du continent, on estime que ce sont 40% des combattants étrangers aujourd’hui,

mais la plus grosse délégation ce sont les Colombiens, environ 10000 d’entre eux.

On a même un bataillon entier dans la 47ème brigade mécanisée ukrainienne composée quasi-uniquement de colombiens.

Pourquoi cela? Parce que la Colombie souffre d’une guerre civile, marquée par les affrontements entre les forces régulières et les guérillas, depuis des décennies

et donc des milliers de personnes, surtout des hommes, ont une expérience du combat, qu’ils viennent de l’armée nationale ou des guérillas qui ont jeté les armes ces dernières années.

En plus de cela, la Colombie a le statut de partenaire stratégique de l’Otan, il y a donc des échanges assez nourris entre l’armée colombienne et l’Otan en général, les Etats-Unis en particulier

alors que les guérillas sont alimentées en partie par le Vénézuela, associé à la Russie depuis de nombreuses années

donc il y a un alignement idéologique avec l’Ukraine.

On entend aussi chez les Colombiens ici en Ukraine des références à Bolivar, le Libertador, et à la lutte pour l’indépendance nationale au début du 19e siècle, mais ça c’est très symbolique.

A ces raisons politiques qui ont canalisé des milliers de Colombiens vers l’Ukraine s’ajoutent des considérations pratiques: le salaire et les compensations qu’ils peuvent obtenir en Ukraine peuvent représenter jusqu’à dix fois ce qu’ils peuvent obtenir en Colombie

ce qui fait que ces deux dernières années, de véritables structures se sont mis en place pour assurer un recrutement régulier.

que ce soit à travers des réseaux personnels ou plus institutionnalisés, regardez cette sodlate très enthousiaste dans cette vidéo Tiktok

évidemment comme je l’ai dit il y a des fraudes et des arnaques, mais c’est quasiment inévitable.

Sur le terrain, les Colombiens sont en général très appréciés du commandement ukrainien pour leur professionnalisme et leur engagement. La réputation qu’ils ont c’est qu’au contraire d’autres nationalités, ils n’ont pas froid aux yeux.

il y a énormément de défis à relever pour les intégrer, entre autres pour adapter les unités ukrainiennes à leurs exigences culinaires ou culturelles,

mais avec les Colombiens comme avec les autres, les Ukrainiens y arrivent, et obtiennent des très bons résultats.

d’autant que maintenant, ils ont atteint un effet de masse qui fait que les Colombiens, et les sud-Américains en règle générale, forment leurs propres unités et n’ont donc plus de problèmes d’intégration avec les Ukrainiens.

Est-ce que ce modèle a de l’avenir? Visiblement, les Ukrainiens regardent vraiment dans cette direction

et tentent d’encourager un recrutement similaire à celui des Colombiens.

Il y a énormément de défis et d’obstacles, linguistiques, culturels, légaux, administratifs et financiers parce que tout ça coute cher, mais ça semble être une tendance

pour faire face au manque de soldats en Ukraine

Pourquoi est-ce ce cas des Colombiens est intéressant? Ce n’est pas la première fois qu’on voit autant de combattants étrangers dans un conflit,

l’usage des mercenaires remonte à la nuit des temps, et comme j’ai dit la Russie fait pareil,

Mais en l’occurrence ça en dit long sur la mondialisation du conflit, donc pas un conflit mondial mais un conflit mondialisé

et ça fait ressortir de manière encore plus criante l’absence des Européens et des autres nationalités de pays alliés

Compte tenu des discussions d’hier à Paris, c’est particulièrement parlant.

Merci d’avoir regardé!

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