Le déclin démographique russe irrémédiable?

Et si la Russie passait d’une population d’environ 146 millions de personnes aujourd’hui à une fourchette de 74 à 112 millions de personnes d’ici l’an 2100?

C’est une projection de l’ONU qui semble correspondre aux craintes des autorités russes qui seraient en train de dissimuler les statistiques de la natalité et de la mortalité

Vladimir Poutine ayant récemment suspendu plusieurs aspects de la conduite des référendums au niveau fédéral jusqu’au 1er janvier 2029.

Et quand on parle des projections démographiques, évidemment que la guerre en Ukraine n’aide pas.

Bonjour à tous c’est Sébastien, bienvenue dans cette nouvelle vidéo où l’on s’intéresse à la situation démographique en Russie,

la situation démographique de l’Ukraine, je l’ai déjà étudié dans plusieurs vidéos, vous pouvez trouvez la dernière ici.

Et les projections sont aussi alarmistes, puisque selon l’ONU, selon cette même analyse de l’ONU, la population pourrait tomber à 15 millions de personnes d’ici 2100, alors que l’Ukraine comptait 52 millions d’habitants au moment de son indépendance en 1991.

Mon point d’accroche pour m’intéresser à la situation de la démographie russe, c’est une annonce qui est sortie en juillet, comme quoi les autorités russes ont arrêté de communiquer sur la natalité, la mortalité et d’autres statistiques dans le courant du mois de juillet

vous l’avez peut-être vu passer, et si je le mentionne c’est qu’il faut prendre cette information avec des pincettes

puisqu’elle vient du renseignement ukrainien, et elle rentre donc dans le cadre de la guerre d’information et de désinformation

en plus de cela, il s’agit de statistiques mensuelles donc il faudra voir si elles sont publiées en août, septembre et après.

Mais de toutes les manières, on sait que l’objet de l’étude, c’est une population sans aucun doute en déclin, avec des tensions ethnique et territoriale à prendre en compte, je vais y revenir.

En Russie, il y a eu trois recensements depuis 1991, auquel il faut ajouter le dernier recensement soviétique de 1989.

En 1989, la république socialiste soviétique de Russie comptait 147 millions d’habitants, soit plus de la moitié des 286 millions de Soviétiques

en 2002, la Russie comptait 145 millions de personnes,

En 2010, presque 143 millions

Et en 2021, de nouveau 147 millions.

Donc on voit en trois décennies une certaine stagnation de la population, mais dans le même temps un maintien, alors que les autres républiques soviétiques et communistes ont toutes connu des déclins dramatiques.

Mais déjà, il faut s’interroger sur la fiabilité des statistiques dans un pays qui a pris l’habitude de dissimuler les données économiques, énergétiques, commerciales et évidemment militaires.

Et ensuite, en janvier 2025, une estimation des services de statistiques russes, donc pas un recensement mais une étude assez officielle, a placé la population à 146 millions de personnes.

Et c’est là qu’on est en droit de se dire qu’il y a un problème parce que ces statistiques incluent non seulement les territoires ukrainiens occupés depuis 2014 mais aussi ceux conquis depuis le 24 février 2022.

Auparavant, seuls les 2 millions d’habitants de la Crimée étaient compris dans les statistiques, pas les républiques fantoches de Donetsk et Louhansk

Donc entre le recensement de 2021 et l’estimation à grande échelle de 2025, la Russie a incorporé des territoires sur lequels vivraient entre 3 et 5 millions d’Ukrainiens

Mais malgré ça elle a perdu 1 million d’habitants? Ca ne colle pas trop.

Et ça, c’est sans compter le départ d’au moins un million de Russes qui entre 2022 et 2023 ont fui la mobilisation et ont cherché à se protéger de la guerre en partant vivre à l’étranger.

et évidemment les pertes militaires directement liées à la guerre.

Vous avez vu passer le seuil de 1 million de pertes, morts et blessés russes, qui aurait été franchi il y a quelques mois,

Donald Trump dans sa vision tronquée du monde semble sûr que le bilan russe est plus élevé que cela encore

Moi je me méfie beaucoup de cette statistique qui encore une fois est mise à jour très régulièrement par le renseignement ukrainien

a minima, je me réfère au décompte très strict que tient le média d’investigation russe Mediazona, en identifiant chaque soldat mort et enterré.

Et actuellement le décompte en est à 119000 morts, avec une estimation haute à 165 000

C’est sans doute plus, et ce qu’on appelle les cas de “mortalité excessive” s’élevaient à 22 000 en 2022, 40 000 en 2023 et 140 000 morts en 2024.

encore une fois selon les statistiques officielles.

En 2024, il y a eu en Russie 600 000 morts de plus que de naissances, ce qui fait un sérieux solde naturel négatif.

Et ces morts sont pour la plupart recensées dans les régions où la mobilisation brasse le plus large: la république de Tuva, l’Altaï, l’okrug autonome de Nenets

donc c’est clairement lié à la guerre.

Et sans même parler des morts et des blessés, si l’on considère qu’il y a au moins un million d’hommes mobilisés dans l’effort de guerre contre l’Ukraine, c’est autant d’individus qui ne contribuent pas à l’économie et qui ne font pas d’enfants.

le taux de natalité en Russie serait de 1,8 enfants par femme en 2025, si cette statistique est fiable.

En 2023, il était tombé à 0,8 enfants par femmes.

Il y a beaucoup de dimensions socio-économiques derrière ces statistiques: le manque de main d’oeuvre pour faire tourner l’économie et payer ses impôts,

la nécessité d’importer de la main d’oeuvre tout autant que des soldats, par exemple à travers des contrats passés avec évidemment les pays d’Asie centrale mais aussi certains pays africains

ce qui peut à terme aggraver les tensions inter-ethniques: on sait que les Russes ethniques, donc les Russki, représentent 72% de tous les citoyens de la fédération de Russie, les rossyski.

que cette proportion est en baisse depuis de nombreuses années, ce qui suscite de nombreuses questions identitaires et religieuses à travers le pays.

Cela soulève aussi des questions territoriales et d’organisation du territoire

déjà en 2023, Vladimir Poutine avait fait une gaffe: officiellement, 27 millions de personnes habitaient à l’est de l’Oural, donc dans la partie qui couvre les 3/4 de la Russie

Mais lui avait avancé avec confiance le chiffre le 12 millions de personnes

ce qui ferait de cet énorme territoire un espace quasi-désertique

et je ne vais pas faire de politique fiction ici mais on sait que d’autre côté de la frontière sud, il y a un milliard de Chinois qui ne demandent pas mieux que d’avoir plus d’espace et de ressources…

en tous les cas, sans aller jusque là, cette évolution démographique pose des questions fondamentales quant à l’avenir de la Russie telle qu’on se la représente: économiquement, culturellement, territorialement

et même si le Kremlin en arrive à conquérir toute l’Ukraine et à incorporer dans sa fédération de Russie des populations qui ne veulent absolument pas en faire partie, cela ne résoudra en rien cette problématique démographique.

Voilà, il me semblait important de faire un point là-dessus, évidemment avec toutes les précautions que j’ai évoqué dans le cours de la vidéo.

Parce que les perspectives démographiques de l’Ukraine sont alarmistes, mais celles de la Russie sont vertigineuses.

Dans les deux cas, elles sont sujettes à évolution d’ici la fin du siècle en fonction de l’économie et surtout de la guerre

mais ces phénomènes, l’Ukraine les subit, alors que la Russie les a provoqué, et ça ressemble quand même beaucoup à une fuite en avant.

Merci

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