Trump sous pression?

Soit un cessez-le-feu de 30 jours ou plus à partir de lundi 12 mai, soit des nouvelles sanctions européennes

C’est une proposition que plusieurs dirigeants européens ont fait à Donald Trump lors d’une visite aujourd’hui à Kiev, donc de concert avec Volodymyr Zelensky,

et donc c’est une propositon qui prend la forme d’un ultimatum à Vladimir Poutine

Bonjour à tous, c’est Sébastien, bienvenue dans cette vidéo, qui est en fait un petit point que je veux enregistrer pour qu’on ne s’y trompe pas: l’ultimatum, il est adressé à Vladimir Poutine mais la pression,

elle n’est pas sur lui, elle est sur Donald Trump qui est dans une position bien plus précaire que ce qu’on aurait pu croire.

D’abord quelques éléments de contexte: les Européens ont monté un défilé de soutien à l’Ukraine

entre le 8 mai, le jour de la capitulation nazie il y a 80 ans et le 9 mai, le jour de cette capitulation pour les Européens de l’est, en fonction de la zone horaire

le 9 mai étant au centre d’une intense bataille des mémoires et la cible de toutes les instrumentalisations, je ne reviens pas là-dessus.

le 9 mai, c’est aussi le jour de l’Europe

Donc on a eu la majorité des ministres européens des affaires étrangères à Lviv hier

pour rendre un hommage aux soldats morts, mais aussi pour annoncer le lancement d’un tribunal spécial pour juger les crimes de guerre russes depuis 2022

Ceux qui ont travaillé sur la documentation de ces crimes, par exemple la prix Nobel de la paix Oleksandra Matviitchouk, ont déjà recensé plus de 83000 cas

il faudra voir si tous ces cas sont effectivement des crimes de guerre d’un point de vue légal,

il faudra aussi et surtout voir si ce tribunal aura une quelconque aura, une légitimité internationale, la question se pose vraiment vu que les critiques adressées à la cour pénale internationale et aux institutions multilatérales en général.

Bref. Aujourd’hui, on a vu sortir d’un train à Kiev 4 dirigeants européens de premier plan, le Britannique Keir Starmer, le Polonais Donald Tusk, l’Allemand Friedrich Merz et le Français Emmanuel Macron,

qui ont tout de suite retrouvé Volodymyr Zelensky pour aller sur Maïdan ensuite pour appeler Donald Trump pour parler cessez-le-feu, force de maintien de la paix ou de réassurance, sanctions.

Entre parenthèses, c’est seulement la deuxième visite d’Emmanuel Macron depuis 2022,

c’est toujours un peu dérangeant de voir que malgré le soutien marqué de la France et les beaux discours du Président, il ne semble pas du tout intéressé de venir en Ukraine

et là il a fallu le dynamisme de Friedrich Merz qui vient tout juste d’être élu chancelier pour qu’Emmanuel Macron se joigne à un voyage de groupe.

Enfin bref, c’est anecdotique.

Au téléphone avec Donald Trump, les Européens ont proposé un cessez-le-feu de 30 jours à partir du 12 mai, donc juste après la fin de la trêve unilatérale pour la parade à Moscou qui n’a pas été respectée sur le terrain.

30 jours, qui doivent normalement permettre l’ouverture d’un dialogue politique.

Si la Russie n’accepte pas, affirment les Européens, ils voteront un nouveau paquet de sanctions.

Bon, la belle affaire, me direz-vous.

D’une part, les sanctions occidentales n’ont pas fait plié la Russie depuis 2022, depuis 2014, et même l’économie russe souffre, il n’y a aucune raison qu’elle s’effondre à cause d’un nouveau paquet.

D’autre part, il est clair que la Russie ne va pas accepter cette proposition ou répondre à cet ultimatum. Dmitri Peskov a été très clair encore ce matin,

tant que l’Ukraine reçoit des armes des Européens et des Américains, les Russes ne veulent pas mettre en place un cessez-le-feu,

ce à quoi s’ajoutent les nombreuses demandes maximalistes de la Russie

qui équivalent en gros à une capitulation de l’Ukraine.

Donc il est très probable que le 12 mai, rien ne changera. Et d’ailleurs sur les réseaux, les Ukrainiens sont plus que sceptiques.

Reconnaissants mais sceptiques.

Non, là ce qui change c’est le facteur américain.

Les Européens ne s’adressent pas à Vladimir Poutine puisqu’ils savent qu’il n’est pas intéressé par la paix sans capitulation de l’Ukraine

les Européens parlent à l’administration Trump

dans les dernières déclarations de Donald Trump, de JD Vance et d’autres, on voit qu’ils affirment de plus en plus publiquement que le blocage vient de la Russie.

Le secrétaire au trésor Scott Bessent a même reconnu qu’il considérait Vladimir Poutine comme un criminel de guerre.

Et donc les Européens mettent Donald Trump face à sa responsabilité: le 12 mai, s’il n’y a pas de cessez-le-feu, ce ne sera pas à cause de l’Ukraine mais de la Russie

et il faudra alors que Washington en tire les conséquences et applique des nouvelles sanctions contre la Russie

parce que pour l’instant à part des menaces et une politique qui a effectivement mené à la chute des cours du baril de pétrole, il n’y a pas grande chose qui a été annoncé

Le secrétaire au trésor Scott Bessent a critiqué la faiblesse des sanctions de l’ère Biden, on va voir ce que lui peut le faire

si Donald Trump lui donne le feu vert

ça c’est la grande question. Mais le Donald Trump, il n’est pas dans une super position là.

il avait promis de régler la guerre à Gaza et en Ukraine, ça n’est pas fait

il se retrouve avec l’amorce d’une guerre entre le Pakistan et l’Inde, deux puissances nucléaires.

Visiblement aujourd’hui il a négocié un cessez-le-feu mais ce samedi soir on apprend qu’il y a eu des explosions dans une ville indienne et des coupures de courant.

Donald Trump subit aussi la pression de sa base républicaine conservatrice qui demande des mesures fortes contre la Russie

Donc cette proposition de cessez-le-feu de 30 jours, elle est d’abord et avant tout adressée à Donald Trump

Je ne sais pas si on peut dire qu’il est mis au pied du mur pour allier le geste à la parole, parce que quelqu’un comme lui peut toujours s’en sortir par une pirouette ou en changeant de sujet.

Mais les Européens et les Ukrainiens, ont assez bien manoeuvré, en confortant une position commune et cohérente, en prouvant leur bonne foi aux Américains et en tentant de leur montrer justement le manque de bonne foi des Russes.

Est-ce que ça va marcher, on verra.

Mais en tout cas, et je termine par là, ça me fait dire que même si le virage idéologique de l’administration trump est réel et vertigineux,

peut-être que ce à quoi on assiste dans la séquence diplomatique c’est beaucoup plus banal, c’est-à-dire l’échec d’une politique de reset des relations avec la Russie

Nicolas Sarkozy avait essayé, ça n’avait pas marché, Barak Obama avait essayé,

Olaf Scholz avait essayé, Emmanuel Macron avait essayé,

et maintenant Donald Trump essaie et ça ne marche pas.

donc c’est peut-être excessivement banal en fait.

mais dans le contexte actuel, ça a des conséquences dramatiques

Merci!

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