Après la chute de Pokrovsk, la pénurie de soldats en Ukraine irrémédiable?

Plusieurs centaines de soldats russes sont infiltrés à Pokrovsk, les combats de rue sont sans pitié,

les Russes poussent sur tous les côtés, y compris sur la ville voisine de Myrnhorad

pour la plupart des observateurs, ces deux villes semblent irrémédiablement perdues et la question sur toutes les lèvres en Ukraine

est celle de l’ordre d’évacuation: quand sera-t-il donné et à quel coût?

Cette nouvelle bataille acharnée pour une ville que la Russie prétend libérer alors qu’elle l’a juste changé en tas de ruines,

pose encore une fois la question de la stratégie de l’Ukraine et de ses capacités pour continuer à résister, notamment ses réserves en ressources humaines.

Bonjour à tous, c’est Sébastien, bienvenue dans cette nouvelle vidéo où l’on essaie de dépasser la perte de Pokrovsk pour prévoir la suite

Je sais qu’il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué, et c’est un dicton qui s’applique très bien à cette agression russe de l’Ukraine

Mais la perte de Pokrovsk semble vraiment actée par l’immense majorité des observateurs, experts et militaires en Ukraine

à partir du moment où les Russes ont multiplié les assauts motorisés pour transporter leur infanterie en ville, je vais y revenir,

et à partir du moment où des centaines de soldats sont désormais infiltrés, menant des batailles de rues dans une atmosphère chaotique,

avec ce phénomène que j’ai déjà abordé, c’est à dire la désintégration de la notion de ligne de front,

avec des positions russes ici, des ukrainiens là, des russes encore là-bas,

et le tout étant très mouvant, très changeant.

Le haut coimmandement ukrainien et Volodymyr Zelensky affirment que la situation est sous contrôle, mais c’est une formule de style qui a été tellement utilisée qu’elle ne veut plus rien dire,

sauf grande surprise, on voit que les Ukrianiens ne peuvent plus sauver Pkrovsk ou Myrhnohrad et que la poche va devoir être abandonnée dans un futur proche.

La bataille pour Pokrovsk aura duré plus d’un an et elle aura donné du fil à retordre aux Russes,

Alors, qu’est-ce qu’il s’est passé pour en arriver à ce dénouement?

d’abord, il est clair que les Russes ont un avantage numérique: ils auraient massé plus de 100.000 hommes dans le secteur

Volodymyr Zelensky parle de 170.000 mais en général on se base sur cette idée de plus de 100.000 hommes.

ils dépassent les Ukrainiens en artillerie, en bombes planantes, en drones FPV

Ensuite, leur stratégie a été assez évolutive, flexible, surprenante et somme toute efficace

de la guerre des drones aux infiltrations par petits groupes de fantassins à pied, des chevauchées infernales sur des motos aux récents assauts motorisés

qui ont beaucoup surpris, ils ont consisté en l’envoi de dizaines de véhicules à la fois, la plupart se faisant dézinguer mais quelques uns résistant pour aller suffisamment loin pour relâcher les fantassins qu’ils contenaient, qui se sont éparpillés dans la nature et ont pris position après.

Les Russes ont aussi perfectionné l’usage de chars d’assaut tortue ou porc épic, qui absorbent les chocs de plusieurs dizaines de drones avant de succomber

ce qui épuise les ressources ukrainiennes et renforce encore plus ce différentiel dans le nombre de drones FPV disponibles.

Ce sont des stratégies qui ont marché, même si les Russes ont accusé des pertes colossales, tant matérielles qu’humaines, même si on n’a pas les chiffres exacts.

Du côté ukrainien, on a des sérieux problèmes, dont un en particulier

les problèmes que l’on a vu pendant cette bataille de Pokrovsk,

c’est évidemment le manque de moyens, d’artillerie, de drones, de logistique, par rapport aux Russes.

On a aussi constaté encore une fois des problèmes de coordination et de communication entre les différentes unités et le haut commandement

ça a été criant pendant la percée russe sur Dobropilliya.

Et là-dessus, on voit que la réforme de l’armée ukrainienne d’un système de brigades à un système de corps d’armée n’a pas porté ses fruits,

la réforme est achevée officiellement mais les différentes unités ne s’en sont pas encore biena apropriées sur des questions d’organisation et de hiérarchie

on le sait tous et j’avais déjà bien insisté là-dessus l’an dernier, réformer une armée pendant une guerre chaude est quasiment impossible,

mais en plus de cela, les différents corps d’armée, pour fonctionner efficacement, ont besoin de plus de troupes.

Un corps d’armée a regroupé de 3 à 5 brigades, constituant un effectif d’environ 50.000 hommes par corps,

mais il n’y a pas suffisamment d’hommes et de femmes pour constituer ce corps et assurer son fonctionnement autonome

et là je parle évidemment du personnel combattant mais aussi du génie, de la communication, de la logistique et ainsi de suite.

Ca, c’est le gros problème que j’ai mentionné il y a quelques secondes: l’armée ukrainienne n’a tout simplement pas suffisamment pas assez de troupes.

Ca fait très longtemps que l’on parle de la crise de la mobilisation, du recrutement, de la formation au sein de l’armée ukrainienne

mais visiblement rien ne s’est arrangé

la Russie a recruté en moyenne plusieurs milliers de soldats de plus par mois sur les deux dernières années

même si l’on rapporte ça aux pertes humaines, qui sont plus élevées du côté russe, du côté de l’agresseur, et ça même Donald Trump l’a compris,

l’avantage est resté aux Russes.

avec la réduction du saillant de Dobropilliya, on voit que l’Ukraine conserve les moyens de dépêcher des forces conséquentes pour faire face à une situation urgente

mais d’abord la réduction de ce saillant s’est éternisée, en se prolongeant sur deux mois

ensuite, pendant que l’armée ukrainienne travaillait à la réduction de ce saillant, la situation s’est détériorée dans plusieurs autres secteurs:

Zaporijjia, Dnipropetrovsk, Lyman, Koupiansk, Vovchansk et bien sûr Pokrovsk

Pendant que l’Ukraine fournissait un effort contre-offensif, la Russie menait pas moins de six efforts offensifs

avec cette tactique de profiter des trous dans la raquette créés par le manque de personnel et la dronisation du front

ce qui ensuite crée des situations où les ennemis sont devant, derrière, à côté, et où il faut encore plus de défenseurs pour colmater une situation critique.

ça, c’est une carence que l’on imagine très mal l’Ukraine résorber dans les mois qui viennent.

et c’est ce qui fait que les Ukrainiens misent d’abord et avant tout sur les frappes dans la profondeur russe et le renforcement des sanctions européennes et américaines.

Même si l’Ukraine procédait à une nouvelle vague de mobilisation à marche forcée, il faudrait plusieurs mois pour stabiliser la situation,

et je parle de stabiliser, pas de renverser la situation.

Pour rajouter à cette complexité, le gouvernement a récemment pris la décision d’autoriser les hommes entre 18 et 23 ans à traverser la frontière,

c’était une mesure d’apaisement social, pour donner un peu d’air libre à une jeunesse qui, il faut l’imaginer, est passée directement du Covid à l’invasion,

Résultat: environ 100.000 jeunes hommes ont quitté le pays en août et septembre

et rien n’indique qu’ils vont revenir.

Cette tranche d’âge n’était pas visée par le recrutement militaire directement,

mais elle constituait un gros groupe de la population active ou pré-active, maintenant il faut les remplacer ce qui est très difficile compte tenu des pénuries de main d’oeuvre qui préexistaient.

et en ce qui concerne le recrutement militaire, on voit d’ores et déjà ce que ça va donner dans quelques mois, quelques années, si la guerre continue

il va y avoir un manque de recrues si les jeunes continuent à partir.

comme je l’ai déjà beaucoup dit, ces départs sont motivés pas par manque de patriotisme ou de conscience civique

mais par une défiance marquée vis-àvis des conditions du recrutement dans l’armée et de la stratégie du haut commandement

c’est pour ça que Pokrovsk est un énième test: on va voir quand et comment le haut commandement va décider de l’évacuation de la poche, pour savoir s’il fait le choix de la préservation de ses troupes ou s’il préfère s’accrocher jusqu’à la dernière minute pour infliger le plus de perte à l’ennemi.

La haut-commandement est déjà très critiqué pour être resté si longtemps, par exemple ici par le blogueur très céléèbre Sternenko,

on va voir si le haut commandemande passe ce test, donc le test militaire il est visiblement manqué, mais là je parle du test de confiance vis-à-vis de l’opinion et de ses propres troupes.

Merci

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